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Budget fédéral 2019-2020 : La science publique y trouve-t-elle son compte?

Même si le budget 2018 prévoyait un nouvel investissement de 1,7 milliard de dollars en recherche scientifique, les scientifiques fédéraux ne s’étaient pas réjouis trop vite, car une grande partie de l’argent attribué se voulait une réponse directe aux constatations de l’Examen du soutien fédéral aux sciences, qui n’ont tenu aucunement compte de la science publique et de son bassin de talents scientifiques. Et en matière d’investissement, c’est la même histoire qui se répète dans le Budget 2019-2020.

Les Canadiens qui ont à cœur la science publique ont tout de même eu quelques bonnes raisons de célébrer depuis l’élection du gouvernement Trudeau. La première mesure significative s’est traduite par la protection de l’intégrité scientifique et l’entente conclue entre le gouvernement et l’IPFPC, le syndicat représentant ses scientifiques, pour enchâsser ces droits dans les conventions collectives et les politiques gouvernementales. Au cours des trois dernières années, le gouvernement Trudeau s’est chargé de réduire la pénurie de main-d’œuvre scientifique causée par les vagues de réduction du gouvernement antérieur. Il a ainsi rétabli 1 500 postes de scientifiques, d’ingénieurs et de chercheurs fédéraux.

Dans un contexte scientifique plus large, l’IPFPC salue le fait que le Budget 2019 s’engage dans la bonne direction pour les étudiants en sciences. Les étudiants qui reçoivent des bourses de recherche du gouvernement fédéral pourront maintenant se prévaloir d’un congé parental en vertu de l’AE. Les organismes subventionnaires fédéraux pourront également prolonger le congé parental de 6 à 12 mois dans le cas des boursiers et des boursiers de recherches postdoctorales.  

Les dépenses réelles en science - en particulier en R et D - sont aujourd'hui plus faibles qu'elles ne l'étaient sous le gouvernement Harper

La plupart des Canadiens seraient toutefois déçus d’apprendre que les dépenses réelles en recherche et en développement (R et D) au gouvernement sont inférieures aujourd’hui à ce qu’elles étaient sous le gouvernement Harper. Même si le financement général de la science est passé de 10,4 milliards de dollars en 2015-2016 à 11,3 milliards de dollars en 2018-2019,1 les dépenses réelles en science publique fédérale selon les prévisions devraient être de 112 millions de dollars inférieures en 2018-2019 à celles de 2014-2015.2 Les dépenses en R et D des scientifiques du gouvernement ont diminué de 891 millions de dollars par rapport à 2010-2011 sous le gouvernement Harper.3

Les gestes posés par le gouvernement fédéral ces dernières années impliquent que son rôle consiste moins à participer à la recherche fondamentale et à la science de réglementation, et davantage à diriger l’argent de la science fédérale vers le secteur privé et les universités dans l’espoir de stimuler l’innovation.

Cette stratégie manque carrément la cible.

Songez à certains des besoins les plus fondamentaux des Canadiens et de notre économie. Nous comptons sur les scientifiques de la fonction publique pour assurer la sécurité de l’air que nous respirons, de l’eau que nous buvons et des aliments que nous consommons. Alors que nos collectivités se débattent avec l’impact des changements climatiques, on ne peut assez insister sur l’importance de la capacité scientifique de la fonction publique. Et pourtant, à quelques exceptions près, la recherche fondamentale et la science réglementaire gouvernementale sont pratiquement absentes du Budget 2019.

L’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA), Santé Canada et Transport Canada obtiennent au total 219,1 millions de dollars sur cinq ans pour le guide de réglementation consolidé, même si l’annonce demeure vague. De nouveaux processus comportant la numérisation du travail et des normes de réglementation de l’ACIA pourraient avoir des répercussions sur le travail de nos scientifiques spécialisés dans la salubrité des aliments. Il faudrait les consulter à l’égard de ces changements afin que le service important qu’ils offrent aux Canadiens ne soit pas perturbé.

Une autre lueur d’espoir est l’établissement d’un nouveau Fonds scientifique stratégique, prévu pour 2022-2023, après de longues consultations avec des organismes tiers de recherche et de science non gouvernementale. L’engagement reste vulnérable aux résultats des prochaines élections. Si le gouvernement va de l’avant avec son programme de financement stratégique au cours des prochaines années, les scientifiques de la fonction publique devraient être au centre de ces consultations.

Qu’il s’agisse de R et D ou de réglementation fondée sur la science, l’IPFPC est d’avis que les Canadiens doivent avoir un meilleur accès à la science publique. La tendance dangereuse vers un sous-financement de la science publique devrait et peut être renversée. La conseillère scientifique en chef doit mettre au point des paramètres pour évaluer la capacité scientifique du gouvernement et faire rapport sur cette capacité.

En sa qualité de syndicat représentant 15 000 scientifiques de la fonction publique, l’IPFPC est prêt à apporter son aide.

Par Maxime Gingras

Agent de recherche de l’IPFPC

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Cet article, dans sa version anglaise, a été publié pour la première fois dans la Section éditoriale 2019 du Centre d'étude sur la politique scientifique canadienne.

1Statistique Canada. Tableau 27-10-0026-01 Dépenses de l’administration fédérale en activités scientifiques et technologiques, selon les principaux ministères et organismes - Perspectives (x 1 000 000).

2Statistique Canada. Tableau 27-10-0006-01 Dépenses de l’administration fédérale en sciences et technologie et leurs composantes, selon l’activité et le secteur d’exécution – Perspectives (x 1 000 000) – Fichier électronique de l’IPFPC Dépenses intra-muros de l’administration fédérale selon le type d’activité scientifique.

3Statistique Canada. Tableau 27-10-0026-01 Dépenses de l’administration fédérale en activités scientifiques et technologiques, selon les principaux ministères et organismes - Perspectives (x 1 000 000). Calculs des auteurs. Voir le fichier de l’IPFPC sur les dépenses intra-muros ministérielles en R et D et en ASC de 2010 à 2019.